L'ermitage de Moisenay, une réserve spirituelle

Andreï Lebedev
écrivain, maître de conférences à l'Institut national des langues et civilisations orientales (INALCO, Paris)



Fondé par des émigrés russes de la première vague, cet ermitage a accueilli pendant longtemps non seulement des moines, mais aussi des émigrés confrontés à la solitude, la pauvreté et la maladie, qui trouvaient entre ces murs refuge et chaleur humaine.

On peut voir de nombreuses croix orthodoxes dans le cimetière municipal de Moisenay: ce sont les tombes des moines et des laïques qui ont vécu et sont morts dans l'ermitage. A l'heure des débats tendus sur l'immigration, souvent perçue comme un fardeau humain dont le poids pèse sur les épaules des « pauvres » Français, l'histoire de cet ermitage témoigne du caractère responsable et constructif des actions de la diaspora russe.



L'ermitage de l'icône de Notre Dame de Kazan à Moisenay, près de Melun, est un lieu unique sur la carte de la diaspora russe en France. Unique sur les plans historique, esthétique, écologique et spirituel.

Edifiée d'après le projet original de l'archimandrite Euthyme (Vendt), l'église du monastère a été entièrement peinte par Grégoire (Krug). La dénomination communément acceptée d' « Andreï Roublev de l'émigration russe » s'est vue confirmée, entre autre, par la tenue d'un colloque international consacré à son œuvre à la Sorbonne (1999). Pour ceux qui le souhaitent, des visites du monastère sont organisées lors de la journée du patrimoine.

Situé en pleine nature, l'ermitage est un lieu de calme et de silence naturels, permettant de retrouver la paix intérieure. Il reste en outre accessible aux Parisiens qui s'y rendent régulièrement. Parmi eux se trouvent les scouts russes qui s'y rassemblent deux fois par an.
 

C'est cependant la présence humaine, et plus précisément la présence ecclésiastique, qui donne tout leur sens aux atouts historiques, esthétiques et écologiques de l'ermitage. L'établissement permanent du hiéromoine Ambroise (Nicoviotis) a permis la constitution d'une paroisse locale. Celle-ci est internationale, composée de Français, et de Grecs, Russes, Bulgares, Albanais ou Africains d'origine. Dans le monde actuel, qui observe le principe de séparation des sphères laïque et religieuse, il est difficile de tromper une personne par une piété de façade et encore plus de l'obliger à fréquenter l'église contre sa volonté. Et pourtant la paroisse locale ne fait que croître en nombre, transformant l'ermitage en ce que l'on pourrait par analogie appeler une réserve spirituelle.